Le président démocrate a réuni les constructeurs de Detroit et le syndicat de l’automobile.
Le PDG de Tesla, Elon Musk, a révolutionné la voiture électrique quand tous les constructeurs l’avaient
délaissée au début du siècle. Il a repris – pour une bouchée de pain –, lors de la grande crise financière, une usine dans la baie de San Francisco abandonnée par Toyota et General Motors. Il a construit une gigantesque usine de batteries électriques dans le Nevada et achève un nouveau site d’assemblage de Tesla au Texas.
Tesla produit américain et occupe encore la moitié du marché domestique du véhicule électrique. Et, pourtant, son patron n’était pas présent lors du grand raout organisé par Joe Biden, jeudi 5 août, sur les pelouses de la Maison Blanche. Le président américain y a signé un décret fixant pour objectif de produire aux Etats-Unis de 40 % à 50 % de véhicules électriques ou hybrides d’ici à 2030. Mais sans le leader du marché. « Ouais, c’est bizarre que Tesla n’ait pas été invité » , a twitté dans la matinée Elon Musk.
Interrogé sur CNBC, le secrétaire au transport, Pete Buttigieg, confus, a expliqué que la révolution électrique concernait tout le marché, et qu’il ne voulait pas donner le sentiment qu’il s’agissait d’un produit de luxe. Sur la pelouse de la Maison Blanche, des véhicules électriques Ford, General Motors ou Jeep, filiale de Chrysler. Mais aucune Tesla. Pendant la cérémonie, le nom du leader du marché n’a jamais été prononcé. C’était la journée du Big Three de Detroit, les trois constructeurs américains, et du syndicat automobile UAW (United Auto Workers).
Joe Biden a ainsi été introduit par le président du syndicat à Detroit, Bernie Ricke : « Nous vous soutenons et vous nous soutenez. »
Et ce dernier de rappeler que Joe Biden et l’UAW travaillent ensemble depuis ses débuts.
Concurrence avec la Chine
Joe Biden s’est réjoui d’avoir en sa présence les patrons de Big Three (Ford, General Motors et Chrysler, absorbé par Stellantis, tous trois syndiqués, à la différence de Tesla) et a déclaré : « La classe moyenne a fait ce pays et la classe moyenne a été faite par les syndicats. » Le président démocrate veut permettre à Detroit de rattraper son retard face à la Chine. « Nous sommes en concurrence avec la Chine et de nombreux autres pays pour le XXIe siècle. Pour gagner, nous devrons nous assurer que le futur sera made in America. »
L’objectif est à la fois considérable – les ventes de véhicules électriques représentent actuellement 3 % du marché américain – mais aussi modeste – l’Union européenne veut arrêter la production de voitures thermiques en 2035. La Maison Blanche souhaite avant tout donner le temps à Detroit de s’adapter.
« L’objectif 2030 est calibré pour laisser le temps aux usines existantes de se moderniser sans abandonner les actifs et d’étendre la fabrication nationale aux Etats-Unis avec les travailleurs syndiqués », écrit la Maison Blanche dans un communiqué.
Joe Biden a répété sa volonté de reconstruire l’Amérique avec les cols bleus, qui ont continué de voter Donald Trump quand ils sont blancs . « On ne laissera personne derrière » , a promis M. Biden, notant que « 90 % des jobs dans les travaux d’infrastructures ne nécessitent pas de maîtrise universitaire ».
Pour basculer vers l’électrique, Joe Biden souhaite installer des bornes de rechargement électrique publiques sur tout le territoire. Le plan en discussion au Sénat prévoit d’y consacrer 7,5 milliards de dollars (6,3 milliards d’euros), la moitié de ce qu’avait proposé au printemps M. Biden, avec 500 000 bornes dans le pays – il y en a actuellement 105 000, dont un tiers en Californie. A titre de comparaison, les Etats-Unis comptent 145 000 stations à essence.
Joe Biden est aussi revenu sur une norme décidée sous Barack Obama mais abolie par Donald Trump sur la consommation d’essence. A partir de 2026, les automobiles devront en moyenne consommer 4,3 litres aux 100 kilomètres, contre 5,9 exigés par Donald Trump. Ce durcissement a reçu le soutien de Ford et des constructeurs étrangers BMW, Volkswagen, Honda et Volvo, qui ont cessé de s’y opposer depuis la défaite de Donald Trump. Ils ont signé un communiqué publié par la Maison Blanche : « Nous restons déterminés à faire avancer le secteur dans la lutte contre le changement climatique. »
Pour l’instant, le projet ne prévoit pas de crédits fiscaux pour les acquéreurs de véhicule électrique mais, selon le Wall Street Journal , la Maison Blanche y travaille. Globalement, l’effort financier est majeur. « Collectivement, l’industrie automobile s’est engagée à investir plus de 330 milliards de dollars sur cinq ans dans le passage à l’électrique » , a résumé John Bozella, président de l’association pour l’innovation automobile, ajoutant : « C’est du vrai argent. »
Article d'Arnaud Leparmentier, correspondant du Monde à New-York
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